mercredi 13 juillet 2016

Chroniques du marais de Goulaine : escalade arboricole

Les Spatules blanches nichent au marais de Goulaine, quelques couples seulement, mais comment suivre leur nidification sans pénétrer dans le marais et sans mettre en danger ces oiseaux ainsi que tous les ardéidés. Depuis un de nos affûts, nous pouvons suivre un couple qui a déjà ses jeunes. Un autre couple est visible quand les adultes sont debout  mais depuis un autre point. D’autres se reproduisent au vu des allers-retours observés mais combien? Il faudrait construire une véritable tour pour dominer le marais. Cette construction serait technique, coûteuse et serait une véritable verrue dans le paysage et interdite de toute façon.
Pour voir en quittant la terre ferme en l’absence d’aile j’ai le choix entre :
- l’hélicoptère, trop cher, trop bruyant, interdit.
- la montgolfière, trop chère, interdite.
- le drone, trop cher, dangereux pour les oiseaux.
- les images satellites de la défense, impossible.

Et si je montais dans un arbre. Quel arbre ? Les peupliers sont des arbres élevés mais l’absence de branche près du sol ne facilite pas l’escalade. Ce qu’il me faut c’est un arbre assez haut, avec des branches régulièrement espacées qui me permettront de m’élever sans danger. De plus, il doit se trouver dans un endroit discret et facile d’accès. Après quelques recherches, je trouve le spécimen adéquat. Après une escalade relativement facile, je m’aperçois que pour atteindre le sommet le risque d’une chute grandi. Effectivement, je commence à dominer la héronnière mais il me faut gagner encore quelques mètres. Seulement la prochaine élévation se fera plutôt à la force des bras. Prudent, je préfère redescendre.
Revenu chez moi je ressors mon vieux matériel de spéléologie. Il me reste un baudrier, des cordes, des mousquetons. Je vais équiper le tronc de l’arbre avec des anneaux de corde autour de la naissance des branches pour pouvoir m’assurer à la montée et à la descente. Je choisis d’y aller en compagnie d'André, si je tombe il pourra prévenir ma veuve !
         Je commence à grimper mais je ne mets pas d’anneau de corde tout de suite afin de ne pas attirer l’attention d’un promeneur. Vers quatre mètres, j’installe le premier anneau autour du tronc juste au dessus de la naissance de la branche; double nœud de pêcheur, je retrouve les gestes de ma jeunesse disparue. Je m’assure en passant le mousqueton de ma longe dans l’anneau et m’élève d’un mètre pour nouer le prochain anneau. Je m’assure sur le nouvel anneau, me libère de l’anneau du dessous et ainsi de suite j’atteins le sommet de l’arbre, enfin presque car le tronc devient un peu mince. 

           Coup d’œil circulaire sur la héronnière, c’est magique de dominer le marais et de voir la répartition des colonies. Trois colonies mixtes concentrent 75% des effectifs des ardéidés, les garde-bœufs sont tous regroupés dans ces secteurs. Le reste de la héronnière est occupé par des couples de Grandes Aigrettes, d’Aigrettes garzettes, de Bihoreaux gris et de Hérons cendrés.  Comme c’est un arbre il y a des feuilles mais en me déplaçant j’ai une vision presque totale. Manque de chance, trois saules blancs masquent une colonie de spatules que je devine seulement. La spatule que je pouvais observer depuis le sol n’est pas seule, je compte trois autres couveurs, génial.
La position n’est pas trop confortable, il manque une branche pour pouvoir appuyer mes deux jambes. L’idéal serait d’avoir une plateforme amovible comme une escarpolette où je me tiendrais debout. La descente s’effectue facilement mais il manque deux anneaux pour plus de sécurité. J’améliorerai le dispositif quand je reviendrai avec mon nouveau bricolage.

Jean-Luc Leschirole